Surveillez les dents de votre enfant dès 5 ans

Vous êtes inquiète à propos des dents de votre enfant ? Laurence de Maistre, docteur en orthodontie et orthopédie dento-faciale explique l’importance de pratiquer l’orthodontie très précoce chez l’enfant.

Les dents et les articulations temporo-mandibulaires (qui articulent la mâchoire inférieure avec le massif facial supérieur) sont de véritables capteurs d’équilibre au même titre que le pied, l’œil et l’oreille interne. Ce sont des éléments déterminants dans la posture. Ma vision de l’orthodontie a donc comme première ambition de mettre le patient dans sa verticalité par l’harmonisation du tonus musculaire, c’est-à-dire dans un équilibre au repos et en mouvement pour une utilisation respectueuse de son corps. La recherche de l’esthétique étant « la cerise sur le gâteau ». Les sportifs de haut niveau l’ont bien compris.
Pour quelle raison pratiquer une orthodontie très précoce ?
Si la coordination des surfaces dentaires et des surfaces articulaires commencent à se fixer dès la mise en place des premières molaires définitives (6 ans), le mouvement musculaire buccal est perceptible dès trois mois intra utéro. Le fœtus suce ses doigts, déglutit le liquide amniotique plusieurs fois par jour, c’est ainsi que l’apprentissage de l’alimentation se met en place pour les premiers mois de la vie.

Avec la mise en place des dents, le mouvement de la langue d’arrière en avant pour la succion-déglutition devrait naturellement passer d’avant en arrière pour la mastication-déglutition or ce n’est pas systématique.  Par ailleurs, la succion est particulière à chaque fœtus. Certains aspireront avec la langue très antérieure, d’autre avec une langue très postérieure prenant un appui sur les lèvres supérieures ou inférieures. Certains prendront des appuis latéraux, utilisant les joues (avec parfois un côté préférentiel). Ce mouvement buccal intra utero façonne des orientations tissulaires et révèle déjà des habitudes posturales, fonctionnelles voire un comportement psycho affectif.
La position du fœtus dans l’utérus, l’adaptation des os du crâne lors de l’accouchement ou l’utilisation de forceps vont influencer les courants cellulaires de croissance osseuse crânienne. Cette croissance crânienne peut être ainsi très déséquilibrée dans les trois sens de l’espace. Enfin il arrive fréquemment que la contrainte d’un frein lingual trop court nuise au bon développement des mâchoires, le regard de l’accoucheur ou du pédiatre est important pour libérer très précocement ce frein.


Comment pratiquer une orthodontie préventive ?
En tout premier par de bonnes habitudes mises en place très tôt dans la famille, c’est-à-dire, dès les premiers mois, il faut surveiller que la respiration soit exclusivement nasale. L’alimentation au sein n’étant pas toujours possible, le biberon doit alors être donné avec une régulation telle que ce soit un effort musculaire pour le bébé et dans une position qui libère un mouvement large de succion.
Puis il faudra mettre en place une alimentation adaptée aux possibilités masticatoires de l’enfant et ne pas l’habituer au grignotage, succion des compotes et autres aliments mous, sucrés et collants ! Stimuler par des jeux un comportement musculaire oro-facial riche et varié (par exemple pour un enfant qui lèche fréquemment sa lèvre inférieure, lui faire lécher du chocolat ou autre sur la lèvre supérieure, faire siffler un enfant aux lèvres molles, lui faire faire des bulles dans l’eau avec une paille ou lui faire pousser une balle en soufflant….
Une orthodontie très jeune (avant 5 ans) permet en stimulant des mouvements inexistants, de réorganiser en profondeur la croissance osseuse. Les arcades dentaires se développeront alors sur des structures osseuses améliorées et dans un environnement musculaire équilibré. Une orthodontie préventive n’est pas systématiquement accompagnée du port d’un appareil (avec les coûts et contraintes que cela engendre). La mise en place de composites et l’équilibration des dents de lait suffisent parfois à réorganiser la croissance des arcades. 

Au-delà chez le jeune adolescent où chez l’adulte le traitement sera plus long et peut demander des compromis sauf s’il s’agit d’un traitement d’alignement dans lequel la croissance faciale et la coordination dentaire est satisfaisante.
Le traitement peut même exiger une chirurgie maxillo-faciale après organisation des arcades dentaires par un traitement orthodontique pour rétablir un équilibre osseux indispensable à la conservation des dents et de leur tissu de soutien. En plus d’un ressenti de déséquilibre facial, la succion d’un doigt, une respiration exclusivement par la bouche, une mastication difficile sont autant de signes d’alerte qui doivent conduire à consulter.
Quel rapport y a-t-il entre l’orthodontie et l’ostéopathie ? 


À la naissance, il est assez fréquent qu’une visite chez l’ostéopathe soit suggérée, soit quand il existe un torticolis congénital, soit lorsque le crâne est déformé par l’accouchement. Lors de l’apprentissage de la marche, une autre visite sera bienvenue. C’est également à cet âge que se mettent en place les dents pour la mastication des aliments.
Le mouvement de la marche est « latéral alterné » tout comme la mastication qui devrait être latérale alternée également mais que notre alimentation molle rend souvent trop rapide, verticale et inadaptée. 

Enfin, lors du traitement orthodontique, pour ne pas fixer par les rapports dentaires une lésion corporelle à distance, là encore 2 à 3 séances d’ostéopathies sont un minimum au cours du traitement.
La difficulté restant la compréhension de l’apport réciproque des uns et des autres car notre langage de praticien est parfois trop technique pour un échange enrichissant et freine la coopération active du patient dans une écoute attentive à lui-même.
Comment se passe la consultation du jeune enfant ?
Dans mon cabinet, elle dure 30 minutes environ, un questionnaire simple est rempli par les parents où il est demandé notamment de souligner les problèmes de naissance, de santé, mais également les habitudes posturales de l’enfant pendant son sommeil ou dans sa façon de s’asseoir.
Pendant ce temps, l’enfant est observé debout de face, de profil, en mouvement. Le serrage des dents est étudié debout et allongé pour vérifier une symétrie de fonctionnement musculaire. Le schéma squelettique facial est visualisé, chaque arcade dentaire est observée pour regarder et compter les dents bien évidemment, repérer les asymétries, la localisation des usures dentaires, puis il faut apprécier des décalages antéro postérieur ou latéraux, des absences de contacts ou des contacts dentaires trop importants avec abrasion des dents de lait généralisée ou localisée.
L’analyse du comportement labiale, linguale, jugale lors des fonctions respiratoires, lors de la déglutition, de la phonation et de la mastication est essentielle. Les mouvements articulaires lors de l’ouverture et de la fermeture avec déjà des orientations unilatérales sont à souligner et à rapprocher d’éventuelles asymétries, la position des yeux, des arcades sourcilières, des narines, des oreilles sont donc notées.
Des examens complémentaires et notamment radiologiques peuvent être demandés pour une consultation ultérieure. 

De nombreuses recommandations sont données au petit patient et à sa famille pour changer le ressenti corporel et l’ouvrir à un meilleur équilibre. Un support vidéo est toujours remis pour accompagner les conseils.
Une ordonnance d’orthophonie ou un mot pour un ostéopathe est parfois nécessaire. Une équilibration dentaire sera entreprise si l’enfant le permet ou envisagée assez rapidement lors d’une deuxième consultation. 

Cette première consultation doit rechercher l’étiologie première pour traiter en profondeur la cause du déséquilibre dentaire et non le symptôme.

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